PittLauraAuPaysDesMilleVolcans

o0° Dans un regard mystérieux, dans une humeur variable, un objet n'est pas précieux mais une parole inoubliable! °0o

Dimanche 29 mars 2015 à 21:18

J'ouvre les yeux et les referme aussitôt. Putain, qu'il fait clair ici ! La lumière et cet environnement bleuâtre m'éblouissent. M'y reprenant à plusieurs fois, je parviens finalement à garder les yeux ouverts. Tout autour, le bleu du ciel et de petits moutons blancs. Au loin, j'aperçois un portail composés de deux grilles étincelantes, bordé de part et d'autres de nuages. Devant lui se trouve un homme penché sur une table de cristal, en appui sur ses avant-bras. Je m'avance, tout d'abord à pas prudent, mais la sensation de flottement me rassure. Ma conscience s'éveille progressivement, au gré de mon avancée. Me retrouvant face à ce que j'avais pris pour un homme, la réalité me percute brutalement : je suis mort !

L'ange esquisse un sourire narquois avant de m'adresser la parole :

- Constant, né le 18 avril 1981 en Corrèze. Français, donc !

Déjà, il ne sourit plus.

- Je lis dans votre dossier que vous avez été, durant votre passage sur terre, bien peu allégeant.

- Euh, qu'entendez-vous par « bien peu allégeant » ?

- La liste est longue Monsieur : émancipation précoce, déni des hiérarchies familiales et sociales, irrespect envers les valeurs des anciens, transgression de normes diverses et variées, militantisme vous ayant mené à de nombreuses insubordinations aux lois terrestres et divines, corruption de la jeunesse, et pour couronner le tout : athéisme.

- En bref, vous avez été un agitateur notoire.

- Je ne peux nier tous les faits, mais enfin, j'ai toujours agit de façon juste, morale, suivant une éthique certaine.

- Vous vous enfoncez Monsieur...

- Bon, déjà, je n'ai jamais transgressé de loi divine : jamais tué, jamais volé, pas marié donc pas trompé. Rah, il y a d'autres mais...

- Monsieur Constant, cela ne sert à rien de tergiverser, votre jugement dernier est tombé. En ces temps de crise, et de surpopulation des cieux, peu importe que vous ayez ou non respecté les 10 commandements que vous tentez de me récitez, nous n'offrons plus les clefs du paradis à ceux qui menaceraient son harmonie.

- Mais...

- Vous vous enfoncez Monsieur...

A ces mots, je me rends soudainement compte que le moelleux des nuages est en train de se ramollir, de se liquéfier même. Je m'enfonce, littéralement. Comme aspiré par le bas. La chute est vertigineuse, tellement rapide que je ne discerne rien autour, juste des couleurs et quelques formes fuyantes. En moins de temps qu'il n'en faudrait pour le dire, mes pieds heurtent le sol, un sol dur n'ayant plus rien de moelleux. Les règles de la physique ne s'exercent pas de la même manière ici bas, heureusement, mes genoux n'ont jamais été bien solides.

Ici, il fait chaud, point de bleu à l'horizon, le sol est sableux et le paysage chaotique. Peu importe où se porte le regard, il n'y a que montagnes, abruptes aux formes inhabituelles et de sang : certaines si énormes qu'elles en touchent le plafond noirâtre, simulacre de ciel. Un bruit, un chant, se fait entendre au loin. Je me laisse guider, dans l'espoir de me sentir moins seul.

« L'barbu, ta sentence, on n'en veut pas! »

« L'barbu, ta sentence, on n'en veut pas! »

Une manifestation, en enfer... Et dire que je pensais avoir tout vu. Un petit groupe de personnes, sans doute des hippies dans l'autre vie, s'étaient regroupées dans une vallée traversée par un ruisseau de lave. Ni pancartes, ni banderoles, juste des slogans scandés les poings levés et regards tournés vers le plafond.

Je m'avance et les contourne, en passant à gauche du méandre formé par le ruisseau incendié. Plus loin, assis à flanc d'une montagne, un groupe de prostrés se lamentent. Ils n'ont pas l'air de meilleure compagnie que les hippies brailleurs. Quitte à passer l'éternité dans cette fournaise, je préfère finalement me trouver un coin tranquille. Au moment de reprendre mon chemin, j'aperçois une pancarte, ou plutôt un panneau d'indication, quasi enseveli dans le sable. Prenant appui sur un rocher, je me penche pour l'attraper et le frotte vigoureusement. Les lettres sont à moitié effacées mais on peut encore en lire les premières : « M », « O », « N », « S », « A », « N ». MONSAN : « mon sang », « monsan », « mon sanctuaire » ? Intriguant...

http://pittlauraaupaysdesmillevolcans.cowblog.fr/images/Sanstitre1-copie-2.jpg

Arbitrairement peut-être, je suppose de la direction que devait pointer le panneau et me remets en route, suivant le ruisseau. Il n'y a pas de chemin et je m'enfonce entre les montagnes avant de me lancer dans une ascension infernale. Des heures, des jours, des mois, ou bien des années plus tard, je ne saurais le dire, je finis par atteindre le sommet. De là-haut, je peux toucher le ciel. Je comprends maintenant qu'il doit sa noirceur à la suie qui le recouvre. En touchant le plafond, mes doigts devinent une forme qui correspond au souvenir de lattes en bois. A tâtons, j'en dessine les contours, les débarrasse de la suie et vois apparaître une poignée ronde en fer forgé : c'est une trappe ! Rien à perdre, je tire de toute mes forces sur la poignée et là... Je manque de m'étrangler. Une enseigne de néons multicolores et clignotante, me narguant. Elle arbore le doux nom de « Monsanto ». Du lobbying par-delà de la vie et la mort !


Jeudi 26 mars 2015 à 18:30

Un projet d'écriture, un roman à plusieurs mains! C'est tentant, tellement, mais ça fait peur, tellement. Le sujet de fond me plaît, je pourrais en discuter des heures et nous en avons déjà souvent débattu avec T. mais de là à narrer une histoire construite autour d'un tel "débat", je ne sais pas. J'ai répondu à la proposition de manière spontanée et transparente, en partageant mes craintes pour conclure par accepter de m'y essayer. Parce que j'en ai envie. S'il ne m'a pas oubliée, T. devrait (re)commencer à me coacher avec ses propres petits ateliers d'écriture ce week-end, pour m'aider à apprendre à décrire des scènes, construire un personnage, créer des dialogues!

Jeudi 26 mars 2015 à 18:21

Les choses se passent... Plutôt facilement, parfois bien et parfois moins bien, certaines posent question, d'autres non, et les ateliers de cuisine se multiplient. Cette semaine, à la demande des accueillis de cuisiner du salé, on a fait des zakouskis! Etrangement - ou pas - ils ne connaissent pas ce mot en France, ils parlent plutôt de "feuilletés apéritifs", hu!
http://pittlauraaupaysdesmillevolcans.cowblog.fr/images/IMG20150326110531.jpg

Oh! Mais j'ai failli ne pas en parler, j'en ai presque honte! La télé est venue à l'accueil de jour pour faire un petit reportage sur notre atelier d'écriture animé par Eloïse - dont j'ai parlé d'un article précédent en intégrant le lien vers le blog mais pour les distraits, je le remets: "La rue au quotidien". L'accueil de jour est estampillée du label "vu à la télé". Pour le coup, ce n'est pas un grand mal puisque le reportage est pas mal et fidèle à l'esprit de l'atelier.

Raaaah! M'énerfe, fouttu Cowblog qui ne permet pas d'incruster les vidéo de FranceTélévision ni d'en uploader une directement de son ordinateur sans passer par Dailymotion -_-. Du coup, je vous mets le lien vers un article du blog dans lequel a pu être intégrée la vidéo du reportage (qui n'est pas longue, hein, juste 3 petites minutes).

Lundi 23 mars 2015 à 20:44

Le bruit des murs

Vincent, il n'aime pas le gris. Et ce qu'il aime encore moins que le gris, ce sont ces quartiers sans âmes, ces rues sans cesse arpentées de fantômes endormis dans leur routine. Vincent, il n'aime pas les gens. Il n'aime pas grand chose d'ailleurs. Ce monde qui part en couille, il ne l'intéresse pas alors il a décidé qu'il n'irait pas se faire mal pour faire face au monde. Pourtant dans sa bulle d'aversions, il y a une chose qui le tient debout, une chose qu'il aime faire et pour laquelle il est doué. Vincent, il dessine, il peint, il graphe. Dans un esprit de contradiction, dans sa philosophie d'emmerdeur, mais sans la moindre volonté de contestation, il colore les murs gris de la ville. Vincent, aphone, fait parler les murs.


http://pittlauraaupaysdesmillevolcans.cowblog.fr/images/Favimcom1782.jpg
Sur ton corps

Du vide innommable à l'aliénation qui enserre.
Dans ces moments vertigineux, où les pensées ne peuvent se détacher de la crainte que ne se dissipe trop tôt la lumière.
Dans ces instants de doute, où l'estime chancelante menace d'effondrement l'existence-même.
Et dans la structure, qui contient, qui étreint, mais qui petit à petit t'éteint.
Quand, surchargé, ton esprit ne sait plus que faire de toutes ses pensées, c'est sur ton corps qu'elles viennent s'imprimer. Lui, il tente de s'activer pour fuir le danger. C'est un corps qui surchauffe, un cœur qui s'emballe et une respiration qui s’étouffe dans la paralysie de l'action.

 

Samedi 7 mars 2015 à 14:35

Petite sortie matinale en quête d'une pompe à vélo. Sur le retour, je croise B. et F. à la terrasse d'un café. On se salue, se fait la bise: on est à l'extérieur, dans un autre cadre souligne B. Ils m'invitent tous deux à prendre un café, ils m'offrent le café. J'essaie d'abord de trouver une excuse, j'ai à faire, les courses pour l'arrivée de ma petite soeur. Ils insistent, j'accepte. Aucune raison de refuser si ce n'est l'envie de profiter seule de ce week-end, mais l'envie n'est pas si forte et je suis du genre à apprécier la compagnie. Je m'assieds, B. m'offre un café, on discute. "On est pas juste la pour demander, on peut donner aussi, c'est ça le partager". Il a trouvé un logement seul et en est heureux, il n'aime pas demander. S., il l'aime beaucoup mais il ne veut rien lui demander. En plus, la seule fois qu'il a demandé deux paires de chaussettes, on lui a répondu "non". Il fait des compliments à F., plein de sincérité, reflétant des sentiments que je ressens également à l'égard de cette homme que je connais peu: "on lui donnerait le bon dieu sans confession". F. parle peu, il écoute, il observe, il sourit, de sa présence bienveillante et apaisante. C'est important de faire des compliments, de rappeler à l'autre qu'il n'est pas juste "pauvre", "à la rue", le gratifier et souligner qu'il est quelqu'un. B. ne pourrait pas travailler à l'accueil de jour, arborer un sourire face à la misère, essayer de détendre les gens, de les faire se sentir bien. Ce n'est pas drôle la misère. Et la Belgique! Il l'a connaît bien, pour y avir vécu cinq ans: Charleroi, Tournai, Ath et les marchés! F. évoque l'idée de se mettre en route, je fais de même et les quitte en les remerciant. Ils me souhaitent un bon week-end et de passer de bons moments avec ma soeur.

http://pittlauraaupaysdesmillevolcans.cowblog.fr/images/barphoto-copie-1.gif
Le cadre, la structure, ils ont leur raison, ils sont légitimes mais ils sont lourds, pesants. On aura beau rester humain, se dégager des marges de manoeuvre que cet environnement institutionnel restera artificiel. Il ne répond pas au besoin immense d'amour de l'autre et d'affection. Et quand il tente de le faire, il vient se mêler à la charité. Il y a cette lutte, des deux côtés du comptoir, pour rester égaux. Ne pas traiter l'autre comme un sous-citoyen malgré soi - parce que les stéréotypes, les préjugés, ils sont là quoi qu'on en dise, quoi qu'on en pense - et ne pas se sentir rabaissé en demandant, ne pas encore dans la casse, ne pas coller à l'étiquette, rester soi, rester un Humain. B. il le perçoit et il en parle de tout ça et puis, il fait ses choix en toute conscience.

Cette rencontre fortuite, elle m'a fait du bien, elle m'a remis les idées en place. Il y a ce que je voudrais bien, à titre personnel, faire, donner, et il y a ce que la structure m'autorise à donner. Il y a mes marges de manoeuvres et mes retraits stratégiques au-derrière du cadre mais, avant tout, il y a l'impératif de rester Moi, de rester Humaine et philanthrope. Ajouter à tout cela le soucis d'équité, la conscience de ne pas être en capacité d'atténuer la souffrance, d'apaiser, d'être pansement pour chacun et la "pratique psy". C'est juste du jonglage, du bricolage à tant d'inconnue. C'est juste la vie.

<< Ante | 1 | 2 | Post >>

Créer un podcast